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Prologue de l'auteur.
Tresillustres et Treschevaleureux champions, gentilz hommes, et aultres, qui voluntiers vous adonnez a toutes gentillesses et honnestetez, vous avez nagueres veu, leu, et sceu, les grandes et inestimables Chronicques de l'enorme geant Gargantua : et comme vrays fideles les avez creues, gualantement, et y avez maintesfoys passe vostre temps avecques les honorables Dames et Damoyselles, leur en faisans beaulx et longs narrez, alors que estiez hors de propos: dont estez bien dignes de grande louange, et memoire sempiternelle. Et a la mienne volunte
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que chascun laissast sa propre besoigne, ne se souciast de son mestier et mist ses affaires propres en oubly, pour y vacquer entierement, sans que son esperit feust de ailleurs distraict ny empesche: jusques a ce que l'on les tint par cueur, affin que si d'adventure l'art de l'Imprimerie cessoit, ou en cas que tous livres perissent, on temps advenir un chascun les peust bien au net enseigner a ses enfans, et a ses successeurs et survivens bailler comme de main en main, ainsy que une religieuse Caballe. Car il y a plus de fruict que paradventure ne pensent un tas de gros talvassiers tous croustelevez, qui entendent beaucoup moins en ces petites joyeusetes, que ne faict Raclet en l'Institute. J'en ay congneu de haultz et puissans seigneurs en bon nombre, qui allant a chasse de grosses bestes, ou voller pour canes: s'il advenoit que la beste ne feust rencontree par les brisees, ou que le faulcon se mist a planer, voyant la proye gaigner a tire Page Fu.3.
d'esle, ilz estoient bien marrys, comme entendez assez: mais leur refuge de reconfort, et affin de ne soy morfondre, estoit a recoler les inestimables faictz dudict Gargantua. Aultres sont par le monde (ce ne sont fariboles) qui estans grandement affligez du mal des dentz, apres avoir tous leurs biens despenduz en medicins sans en rien profiter, ne ont trouve remede plus expedient que de mettre lesdictes chronicques entre deux beaulx linges bien chaulx, et les appliquer au lieu de la douleur, les sinapizand avecques un peu de pouldre doribus. Mais que diray je des pauvres verolez et goutteux? O quantesfoys nous les avons veu, a l'heure que ilz estoyent bien oingtz et engressez a poinct et le visaige leur reluysoit comme la claveure d'un charnier, et les dentz leur tressailloyent comme font les marchettes d'un clavier d'orgues ou d'espinette, quand on joue dessus, et que le gosier leur escumoit comme a un verrat que les vaultres Page [3v]
ont aculé entre les toilles: que faisoyent ilz alors? toute leur consolation n'estoit que de ouyr lire quelque page dudict livre. Et en avons veu qui se donnoyent a cent pipes de vieulx diables, en cas que ilz n'eussent senty allegement manifeste a la lecture dudict livre, lors qu'on les tenoit es lymbes, ny plus ny moins que les femmes estans en mal d'enfant quand on leurs leist la vie de saincte Marguerite. Est ce rien cela? Trouve moy livre en quelque langue, en quelque faculte et science que ce soit, qui ayt telles vertus, proprietes, et prerogatives, et je poieray chopine de trippes. Non messieurs non. Il est sans pair, incomparable et sans parragon. Je le maintiens jusques au feu exclusive. Et ceulx qui vouldroient maintenir que si reputes les abuseurs prestinateurs, emposteurs, et seducteurs. Bien vray est il, que l'on trouve en aulcunslivres dignes de haulte fustaye certaines proprietes occultes, au nombre desquelz Page Fu.4.
l'on tient Fessepinte, Orlando furioso, Robert le diable, Fierabras, Guillaume sans paour, Huon de bourdeaulx, Montevieille, et Matabrune. Mais ilz ne sont comparables a celluy duquel parlons. Et le monde a bien congneu par experience infallible le grand emolument et utilite qui venoit de ladicte chronicque Gargantuine: car il en a este plus vendu par les imprimeurs en deux moys, qu'il ne sera achete de Bibles en neuf ans. Voulant doncques je vostre humble esclave accroistre vos passetemps dadvantaige, vous offre de present un aultre livre de mesme billon sinon qu'il est un peu plus equitable et digne de foy que n'estoit l'aultre. Car ne croyez (si ne voulez errer a vostre escient) que j'en parle comme les juifz de la loy. Je ne suis nay en telle planette, et ne m'advint oncques de mentir, ou asseurer chose que ne feust veritable. J'en parle comme un gaillard Onocratale, voyre dy je crotenotaire des martyrs amans Page [4v]
et crocquenotaire de amours: quod vidimus testamur
Réel
Hypothétique
Fictif
Mythique
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Région, contrée
Ville, village
Bâtiment
Étendue, cours d'eau
Montagne, île, ...
Autre
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